142
père Raniero Cantalamessa
Méditation 14-XII-01, n. 4
Pour d´autres, plus important que celui des paroles, sera le jeûne des pensées. Je m´explique avec les mots d´un moine chartreux anonyme, notre contemporain :
"Observe pendant un seul jour le cours de tes pensées : la fréquence et la vivacité de tes critiques internes avec des interlocuteurs imaginaires, ou avec des proches, te surprendront. Quelle est généralement leur origine ? Le mécontentement à cause des supérieurs qui ne nous aiment pas, ne nous estiment pas, ne nous comprennent pas ; ils sont sévères, injustes, trop avares avec nous ou d´autres opprimés. Nous sommes mécontents de nos frères que nous jugeons peu compréhensifs, têtus, expéditifs, confus ou injurieux... Alors, dans notre esprit se crée un tribunal, au sein duquel nous sommes tout à la fois le procureur, le président, le juge et le juré ; rarement l´avocat, sinon en notre faveur. Les torts sont exposés ; les raisons pesées ; on se défend ; on se justifie ; on condamne l´absent. Peut-être élabore-t-on des plans de revanche ou des manœuvres vengeresses... Au fond, il s´agit de sursauts d´amour propre, de jugements trop rapides ou téméraires, d´une agitation passionnelle qui se conclut par la perte de la paix intérieure".
Il existe des personnes qui passent des heures et des heures à mastiquer certaines racines qu´elles tournent et retournent dans leur bouche. Quand nous ressassons ces pensées, nous leur ressemblons, sauf que dans notre cas, ce que nous mastiquons est une racine vénéneuse... Il faut remplacer le ressentiment inspiré par l´amour propre, par le pardon. Le pardon a une valeur thérapeutique : il guérit celui qui le donne comme celui qui le reçoit.