Le moment est venu d'exposer moi-même les occupations de la « faction chrétienne » : ainsi, après avoir réfuté le mal, je montrerai le bien. Nous formons une « corporation » par la communauté de la religion, par l'unité de la discipline, par le lien d'une même espérance. Nous tenons des réunions et des assemblées pour assiéger Dieu par nos prières, en bataillon serré, si je puis ainsi dire. Cette violence plaît à Dieu. Nous prions aussi pour les empereurs, pour leurs ministres et pour les autorités, pour l'état présent du siècle, pour la paix du monde, pour l'ajournement de la fin.
Mais c'est surtout cette pratique de la charité qui, aux yeux de quelques-uns, nous imprime une marque spéciale. « Voyez, dit-on, comme ils s'aiment les uns les autres », car eux se détestent les uns les autres ; « voyez, dit-on, comme ils sont prêts à mourir les uns pour les autres », car eux sont plutôt prêts à se tuer les uns les autres. Quant au nom de « frères » par lequel nous sommes désignés, il ne les fait déraisonner, je crois, que parce que, chez eux, tous les noms de parenté ne sont donnés que par une affection simulée. Or, nous sommes même vos frères, par le droit de la nature, notre mère commune ; il est vrai que vous n'êtes guère des hommes, étant de mauvais frères. Mais avec combien plus de raison appelle-t-on frères et considère-t-on comme frères ceux qui reconnaissent comme Père un même Dieu, qui se sont abreuvés au même esprit de sainteté, qui, sortis du même sein de l'ignorance, ont vu luire, émerveillés, la même lumière de la vérité !