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St Jérôme
Comment. sur St Matthieu, II, p. 63-65
Ainsi vous traitera mon Père céleste si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur (cf Mt 18, 23-35).
Dans cette parabole du roi, le maître, et du serviteur qui lui devait dix mille talents et par ses supplications avait obtenu le pardon de son maître, le Seigneur a enseigné à Pierre à pardonner lui aussi à ses compagnons d’esclavage moins coupables. (...) Cela (les fautes graves) lui est pardonné, à sa prière, pourvu qu’il pardonne de son côté à ceux qui ont commis des fautes légères ; mais si pour une offense nous sommes implacables, si, pour un mot trop amer, nous entretenons des discordes perpétuelles, ne nous semble-t-il pas qu’il faut avec justice nous mettre en prison et que l’exemple de notre conduite aboutit à nous faire refuser le pardon pour nos fautes plus graves ? (...)
Sentence redoutable s’il est vrai que le jugement de Dieu varie et change selon les dispositions de notre esprit. Si nous ne pardonnons pas à nos frères leurs petites offenses, Dieu ne nous pardonnera pas les grandes. Comme chacun peut dire : "Je n’ai rien contre lui, il le sait lui, c’est Dieu qui le juge. Peu m’importent ses intentions à mon égard (*), moi je lui ai pardonné", le Seigneur confirme sa sentence, fait tomber le masque d’une paix hypocrite par ces mots : "si vous ne pardonnez pas chacun à votre frère du fond du cœur".
(*) En se désintéressant de son frère et de ce qu’il va faire,
ce chrétien montre qu’il n’a pas pardonné du fond du cœur.